Souvenirs recueillis auprès des anciens de Marchais
Que sait-on à propos des aviateurs anglais tués durant le conflit de 1939-45 et inhumés à Liesse ?
Pour les trois premiers aviateurs non-identifiés, leurs tombes (au fond à gauche) portent la date du 18 mai 1940. Cela remonte juste après la bataille de Montcornet par le général de Gaulle, avant le repli de l'amée française.
Or, dans les souvenirs des anciens de Marchais, il est un fait qui n'a pas toujours été raconté ouvertement - car peu glorieux - et pour cause - et qui permettrait peut-être de les identifier.
Des soldats français, avant leur repli, avaient installé leur mitrailleuse à la dernière maison en direction de Reims, à droite, en cassant, pour ce faire, une partie du mur de soutènement du jardin de Jean Bornier.
Ce même mois de mai 1940, ils ont tiré sur un avion qui passait par là, volant en direction du nord-est, entre Sissonne et Sainte Preuve. Ils auraient dit à un habitant qui passait là au même moment :
"Ca en fera un de moins, pensant qu'il s'agissait d'un avion ennemi"
Gravement touché, l'avion commença à descendre. Le pilote s'empressa de larguer ses bombes qui tombèrent dans une pâture en bordure Sud-Est du village.
Des bêtes y furent blessées par des éclats et la tonne qui servait de réservoir d'eau fut transpercée. Quelques centaines de mètres plus loin, l'avion piqua et s'écrasa au lieu -dit 'Tartapierre', prenant feu aussitôt.
Quand on regarde la trajectoire que l'avion a suivi, on peut penser que ses gouvernes étaient bloquées car il a viré sur la droite jusqu'à son point de chute.
Lorsque les habitants se rendirent sur place, il constatèrent que c'était un avion anglais. Les tireurs s'étaient lourdement trompés sur l'identification de l'appareil.
Ultérieurement, les corps des aviateurs - où du moins ce qui en restait - ont été transportés à Liesse. Selon les tombes de Liesse, il n'y a que trois anglais tués à cette date de mai 40. Ce serait donc ceux de Marchais, abattus en se dirigeant vers l'est !
Deux autres avions ont été abattus dont un entre l'ermitage et le chemin de Liesse à la Montinette, l'autre au lieu-dit le poteau et la fleur de lys, à la corne du bois, près du canal entourant le château. Les aviateurs de cet avion ont été inhumés à Liesse avec une cérémonie à la basilique où les troupes allemandes leur ont rendu les honneurs.
Il semblerait, au dire des anciens, que les moteurs de ces avions, lourdement enfoncés dans les sables, seraient encore en place. Leurs positions ont été enregistrées sur une carte du terroir.
(Jean PESTEL)
Dernière mise à jour Août 2018
Dans le cimetière de Liesse, le carré des aviateurs anglais étale ses 47 pierres tombales qui rappellent les durs combats de la seconde guerre mondiale. Lorsque des descendants de ces combattants arrivent chez nous, ils sont parfois déçus de constater que le temps a effacé bien des mémoires. Bien sûr, les rangs des anciens qui ont connu cette période sombre de 1940 à 1945 s’éclaircissent de plus en plus et les nouvelles générations pensent que cette période est bien loin d’elles ! Pourtant, jeter un regard 70 ans en arrière, c’est faire un retour sur la vie d’un père, d’une mère, d’un grand parent, bref, de quelqu’un de très proche et, géographiquement parlant, la plupart de ces aviateurs ont trouvé la mort à Marchais, à Liesse, à Samoussy ou à Vesles et Caumont ! Autant dire à notre porte ! Alors, est-ce vraiment si loin ? Notre devoir de mémoire reste intact : les aviateurs inhumés à Liesse ne représentent qu’une infime partie de tous ces jeunes de 17 à 34 ans qui ont sacrifié leur vie pour que nous, nous puissions retrouver notre liberté qui était fortement menacée. Leur sacrifice altruiste mérite une reconnaissance prolongée au-delà du temps et de l’espace. Si « internet »* est là pour remémorer ces pans d’une histoire locale, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver (* France crashes 39- 45 aviateurs anglais).
Cet article n’a pas d’autres ambitions que de préciser où ces hommes ont péri pour nous ! (si vous êtes en mesure de compléter ce document, vos observations seront les bienvenues)
Conflit 1939-1945
Parmi les tombes des Aviateurs Anglais inhumés à Liesse
11 concernent des aviateurs tombés sur Marchais ou entre Marchais et Liesse.
(Références des crashes correspondants)
Il y a 4 rangées de tombes, certaines isolées, d’autres groupées. Il y a 47 pierres tombales mais dans certaines, les restes de plusieurs corps ont été regroupés.
En commençant par le fond, à gauche, on relève :
- à la première ligne :
- 3 tombes d’aviateurs inconnus.
Ce sont les occupants des deux avions tombés à Marchais le 17 mai 1940 en fin d’après-midi, abattus après une erreur d’identification par les mitrailleurs du 3° R.A.M. (un Bristol Blenheim, à Tartapierre, avec 2 hommes et un Ferrey Battle ou un Hurricane (?) entre l’ermitage et le chemin allant de Sainte Suzanne à la rivière, avec un seul homme, selon les relevés faits par l’infirmière-pilote Germaine Lherbier-Montagnon en 1941). Ces avions faisaient partie de ceux qui tentaient d’enrayer la progression des troupes allemandes.
Les tombes portent la date du 18 mai car les corps n’ont été ramassés par les Allemands qu’à leur arrivée à Marchais, le lendemain du crash.
(le 17, devant l’arrivée imminente des Allemands, l’exode avait commencé à Marchais et le 3° Régiment d’Auto Mitrailleuse a quitté le château le 18 vers 2h du matin avant l’entrée des allemands au village) (voir le livre du Dr Soubiran : « j’étais médecin avec les chars »)
- un groupe de 4 tombes qui regroupent les restes des 7 membres de l’équipage du
Lancaster A.L B I – B III s/n DV 294 QR-K, de retour d’une mission sur Ausburg et abattu le 25 février 1944 au Ménil Annelles (08) par Ludwig Meister
Equipage : H.F BORE, W. CRAIG, A.T. GARRETT, NIXON, J.L. CHAPMAN, J.W. DEVENISH & H.W.J. PAIN
- un groupe de 7 tombes portant la date du 26 février 1944
S.A ISHAM, K.M. MACKNIGHT, C.J. JONHSON, L.W. ROBERTS, K. LINDFOR, NELSON & T. WINN, les 7 membres de l’équipage du Avro-Lancaster Type B I-BIII s/n DV 274 JO-R, du 463° squadron, de retour de mission sur Ausburg abattu par Reinhard Kollac près de Liesse (mais où ?)
- 4 tombes qui regroupent les restes des corps de l’ équipage du
Avro-Lancaster BI s/n ME 582 BQ-E du 550° squadron, abattu à Leuze, près d’Hirson, dans la nuit du 25 au 26 février 1944, de retour de la mission sur Ausburg, par, peut-être aussi, Ludwig Meister
Equipage : P.L. COLMAN, A. HATTFIELD, W. JOHNSTONE, J.L. POWELL, H. STOLLAR, C. TATTERSALL, W.R. WILLIAMS
- à la deuxième ligne :
- à la date du 6 novembre 1943
l’équipage d’un Halifax Type BII s/n JN 921 NF-B du 138° squadron, abattu près de la ferme de Puisieux (près d’Athies sous Laon, en limite de l’aérodrome de Samoussy) (selon l’enregistrement du transfert des corps à Liesse en 1943), abattu par la F.L.A.K. au cours de l’opération TOM 6 - France
Equipage : W. AITKENHEAD, R.T. BROWN, C.W. CHARROTT, K.R. COPAS, J.R.G. DAY, R. MORRISH, et ensuite, 2 tombes séparées (sergeant LAWRENSON Frédérick et sergeant A.R. FLATTERS, mitrailleur)
- à la troisième ligne :
- un groupe de tombes, à la date du 17 avril 1943 au nom de : H.W. FILL, flight ingeneer, Royal Canadian Air Force, A.P. GIELTY, L.G. HAINES, L. MACDONALD, F.R. PILON, R.H. WINTER & J.J.A. GUAY
qui constituaient l’équipage du Halifax Type B4 s/n BB 343 EQ-X, du 408° squadron Goose RCAF
de retour d’une mission sur Pilsen : usine d’armement Skoda, abattu par Adolf Brandstetter, le 17 avril 1943 au Calvaire, près de Lesquielles St Germain.
- et encore un autre groupe de tombes, toujours à la date du 17 avril 1943 :
il s’agit de l’ équipage du HalifaxType II s/n DT 575 MP-Y du 76° squadron, abattu par le chasseur UFFZ Alfred P. Meille (sur la route de Pierrepont à Marle) : à Vesle et Caumont
S.H.C. BROWN (RAF), B.J. CLINGING (RAF), F.C. FIDGEON (RAF), F.O. ROSS (RCAF), J. STRACHAN (RAF), B.W. WEDDERBURN (RAF) & L.N. JONASSON (RCAF)
- 4 tombes portant la date du 29 août 1942 au nom de :
M.S. BRIGHOUSE (R Australian AF), C.N. CHALKEN (R Canadian AF), K.T. PELLET (R Canadian AF) & L.G. LYONS (R Australian AF), équipage du Hampden Type I s/n AT 228 EQ-U, de retour d’un raid sur Sarrebrück, abattu dans la nuit du 28 au 29 par la chasse de nuit allemande à 2 heures, tombé au « Longpont », entre Liesse et Marchais, à cheval sur la limite des 2 communes, face à la maison de garde, à 300 m en direction de la Montinette (voir photos de Gerd Leimbach de la 95° D.I. allemande)
- à la quatrième ligne :
- à la date du : 11 septembre 1943
T.D.L. LESLIE, officier pilote du 609° squadron de la RAF, abattu près de Juvincourt par la FLAK ou en combat aérien au cours de l’opération « Rhubarb », attaque d’aérodrome, à bord de son Typhoon MK-I B s/n JP 678 PR-O, du 609° squadron
- 4 tombes à la date du 16 avril 1943
C. BOURNE (RAF), G. CRUICKSHANK (RAF), J.R. MARTYN (RCAF) & J.W. YOUNG (RAF)
Equipage du Halifax B II s/n W 7873 TL°M, du 35° sq RAF, Madras Présidency, tombé au coin du parc du château de Marchais, de l’autre côté de la route (le Longpont ou Fleur de Lis), au retour d’une mission sur Pilsen, avion touché par la FLAK à 16 000 pieds et évacué partiellement en parachute à 22 h 58, il y a eu 2 évadés, Allen et Bradley, qui ont été recueillis et exfiltrés par des personnes d’Amifontaine, et 1 prisonnier.
(Madame Lupette me disait un jour se souvenir de ce prisonnier en tenue de vol dans la rue de Liesse car elle habitait près de la Kommandantur. Ce pilote, W.R. Owen, a été ensuite déporté au stalag LUFT 3 de Pow 1272)
(la famille du sergent W.R. Allen est venue sur les lieux en Août 2015 à la demande de la fille du pilote Owen)
D’autres aviateurs abattus dans la région ont été temporairement inhumés à Liesse puis emportés, soit vers Champigneul en Champagne, soit aux U.S.A.
Voir le site France crashes (attention, lien externe, vous allez quitter notre site)
(Jean PESTEL, mise à jour d'août 2018)
Sources :
- Les fiches d’enregistrement de la Mairie de Liesse lors du dépôt des corps au cimetière communal.
- En italique : des familles venant à Liesse.
- Voir le site « France-crashes » avions anglais 39-45.
L’épave du Hampden tombé entre Liesse et Marchais (photo de Gerd Leimbach de la 96° D.I. allemande remise aimablement par ses descendants)